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Séquence                 Le conte philosophique et ses enjeux

  


Candide

Voltaire

1759

 

Séance n°1           Introduction à Candide  

 

QUESTIONS  PRELIMINAIRES :

 

v     Etude de l’image 8, « L’éruption du Vésuve et scène de naufrage » d’Abraham-Louis-Rodolphe Ducros.

 

 

1.      Question 1. La philosophie leibnizienne conçoit Dieu comme le divin horloger ». Comment cette conception se trouve-t-elle contestée dans le tableau de Ducros ?

 

 

2.      Question 2. Quels moyens le peintre a-t-il utilisés pour rendre compte d’une catastrophe qui dépasse l’entendement ?

 

 

3.      Question 3. Quelle est la place des êtres humains dans cette peinture ? Reliez votre constat au propos de Voltaire dans la « Prière à Dieu » du Traité sur la tolérance.

 

v     Etude de l’image 16, E. Malassis, Candide cultivant son jardin, 1922.

 

1.      Question 4. Cette illustration nous montre un jardin. A quel jardin mythique cela fait-il référence ? Quelle est cependant la différence essentielle entre le jardin mythique et celui-ci ?

 

 

I –                Problématiques de l’oeuvre

 

Objectif : Situer l’œuvre dans un ensemble de débats littéraires et philosophiques

 

Pour aborder l’œuvre Candide de Voltaire, il faut tout d’abord se prémunir d’un écueil : il faut éviter de se mettre au garde à vous intellectuel. Candide, c’est d’abord une accumulation de péripéties, destinées à faire sourire, une sorte de tableau hétéroclite du monde, et en particulier de ses horreurs.

Candide, c’est d’abord ceci : illustration de Jacques Pruvost en 1928 : tempête, naufrage, meurtre, pendaison, emprisonnement, famine, mais aussi richesse, amour, réjouissance terrestre. L’image est construite en deux parties : la partie de gauche représente tous les malheurs, celle de droite les bienfaits et les bonheurs. Le personnage central en bas est jeune, sa figure ronde laisse supposer une certaine naïveté : il s’agit du personnage éponyme Candide.  Celui qui est à gauche tente de la convaincre de sa vision pessimiste du monde, il s’agit de Martin, qui est présenté dans l’œuvre à la fin du chap.XIX, p.107-109. L’autre, qui est d’ailleurs d’expression joyeuse, tente de le convaincre des bonheurs de l’existence, quitte à croire que le monde se résume à cela : il s’agit vraisemblablement de Pangloss, le maître de Candide. 

 

Nous serons donc dans la diversité des épisodes et des péripéties mais aussi dans le conflit d’idées. L’œuvre entre donc dans les débats des Lumières.

 

Les philosophes luttent contre le préjugé au nom de l’exercice de la Raison. Pour Fontenelle, cet exercice de la Raison doit s’appuyer sur l’examen minutieux des faits dans une démarche empirique.

Raison : faculté pensante qui permet à l’homme de connaître, de juger et d’agir conformément à des principes ; pensée logique par opposition à l’intuition et au sentiment.

 

Or le préjugé est la pensée toute faite, l’opinion préconçue.

v     Cela peut être la vérité imposée par un écrit et que l’on doit accepter telle quelle, cf. pensée religieuse.

v     Mais cela peut être aussi une théorie qui fonctionne en circuit fermée, un système philosophique qui échafaude des idées sans se référer à la réalité. C’est ce qu’on appelle la métaphysique (philosophie ayant pour objet la connaissance de l’être absolu, des causes de l’univers et des principes premiers de la connaissance). Or, c’est tout d’abord à ce type de raisonnement que s’en prend Voltaire. Ces raisonnements métaphysiques proposent un modèle d’explication du monde, mais qui n’est pas éprouvé par les faits, le réel.

Lors de son voyage à travers le monde, Candide a l’occasion de mettre à l’épreuve ces diverses métaphysiques en les confrontant à la réalité qu’il voit (d’où la multiplicité des péripéties de l’œuvre illustrées).

Parmi ces métaphysiques, il y en a deux auxquelles se confronte Candide : l’optimisme et le pessimisme.

L’optimisme est la philosophie de Leibniz. Elle est remise en cause aux yeux de Voltaire par tous les fléaux de la terre et en particulier par le tremblement de terre de Lisbonne, en 1755, qui motive en partie l’écriture de l’œuvre, publiée en 1759.

L’optimisme part du principe que Dieu est un être parfait. Or ce principe ne peut être vérifié. C’est déjà une des causes des attaques de Voltaire. La métaphysique Leibnizienne repose sur un principe fondateur qui est coupé du réel. Or, de ce principe découle tout le système visant à expliquer le monde. Si Dieu est un être parfait, ce qu’il a créé ne peut être que parfait, ou du moins le meilleur des mondes possibles. Or, Voltaire confronte cette idée aux catastrophes de la terre et à tout ce que voit Candide.

 

II -    Etude de documents iconographiques

 

Objectifs : Voir l’universalité des débats philosophiques soulevés par l’œuvre.

Question : Quelles conceptions du monde s’opposent et y a-t-il des significations ou des solutions apportées ?

 

v     Etude de l’image 8, « L’éruption du Vésuve et scène de naufrage » d’Abraham-Louis-Rodolphe Ducros.

 

La philosophie leibnizienne suppose que le monde est le meilleur des mondes, créé par un Dieu parfait. Dieu est présenté aussi comme le « divin horloger », ie celui qui ordonnance le monde de façon harmonieuse et selon un dessein ( dessin) parfait. En quoi la peinture remet-elle en cause cette idée.

 

La philosophie leibnizienne conçoit Dieu comme le divin horloger ». Comment cette conception se trouve-t-elle contestée dans le tableau de Ducros ?

 

 Il y a une accumulation de catastrophes qui envahissent le tableau et bouchent la perspective : éruption, tonnerre, tempête, ras de marée.

 

Quels moyens le peintre a-t-il utilisés pour rendre compte d’une catastrophe qui dépasse l’entendement ?

 

La scène est saisie à un moment particulièrement dramatique, sur l’instant : le bateau est en train de sombrer (on voit encore le mat) et les deux personnages tentent de se hisser sur un rivage escarpé et hostile. L’univers est bouleversé et ne peut correspondre au grand ordonnancement voulu par Dieu : au moutonnement des nuages correspond le moutonnement de la mer et le gigantisme de la vision ainsi que les  formes torturées rendent une atmosphère épique qui ne correspond par à l’idée d’harmonie. La peinture est essentiellement fondée sur l’hyperbole, comme disproportion des éléments. (Hyperbole : procédés d’exagération de l’expression. Il s’agit d’augmenter excessivement la réalité que l’on veut exprimer de manière à produire plus d’impression ; fréquemment utilisée dans le registre épique).

 

Quelle est la place des êtres humains dans cette peinture ? Reliez votre constat au propos de Voltaire dans la « Prière à Dieu » du Traité sur la tolérance.

 

 Enfin, les personnages sont minuscules et littéralement écrasés par des forces qui les dépassent (procédés d’antithèse : figure d’opposition qui rapproche des notions contraires). Ils sont le jouet des éléments. Cela rend bien ce que dit Voltaire dans le Traité sur la tolérance : « à ces minuscules atomes perdus dans l’immensité de l’univers ».

 

Voltaire montre que ces philosophies coupées du réel (le pessimisme l’est tout autant que l’optimisme) tourne à l’idée fixe, à l’idéologie coupée du réel. L’optimisme commet également la faute de sous-estimer la souffrance humaine. Si le monde créé est parfait, le mal qui existe ne peut être qu’en vue d’un plus grand bien. Cela revient à justifier le mal par le dessein final de Dieu, ce qui est proprement scandaleux. La souffrance humaine devient une abstraction nécessaire à l’harmonie universelle. (En réalité la position de Leibniz n’est pas aussi simple : il s’agit avant tout de penser le monde comme une totalité où tout est relié, où chaque chose traduit un aspect du dessein de Dieu. C’est en ce sens que l’existence particulière du mal peut être  intégrée à ce projet.)

 

Ccl° : L’accumulation des catastrophes dans le conte et des expériences malheureuses constitue autant de démentis à la philosophie leibnizienne. La peinture de Ducros offre pareillement le même démenti avec cette vision d’une nature essentiellement hostile et horrible.

 

Si Voltaire refuse les théories philosophiques, les systèmes métaphysiques, il ne peut donc en proposer dans son œuvre. Il préfère donner une sagesse faite d’humilité et de modération mais qui n’est pas coupée du réel, et qui peut déboucher sur l’action. I. 16.

 

v     Etude de l’image 16, E. Malassis, Candide cultivant son jardin, 1922.

 

Cette illustration nous montre un jardin. A quel jardin mythique cela fait-il référence ? Quelle est cependant la différence essentielle entre le jardin mythique et celui-ci ?

 

L’image du jardin est fortement culturel. Chacun peut songer au jardin d’Eden, celui de la Genèse, où les premiers hommes ont vécu heureux. Dans l’œuvre, le château du baron peut être assimilé à un Eden (même s’il est faux). Il est remplacé par le pays d’Eldorado puis par le jardin final où s’installent Candide et la communauté. la différence est ici essentielle : les habitants du jardin travaillent. L’œuvre s’achève sur l’image du jardin où les héros travaillent pour subvenir à leurs besoins et pour mener une vie la plus tranquille possible. Il ne s’agit pas de donner entièrement le sens final de l’auteur, mais on peut penser à ce qu’a fait Voltaire à la fin de sa vie à Ferney où il a travaillé à rendre la vie des habitants plus supportable. (p.17).

 

 

ccl° : Donc, Voltaire ne se bat pas avec de grandes idées. Il combat les théories avec une distance qui les déconstruit, ie l’ironie, la dérision, l’humour noir qui permet de faire ressortir le sordide de ces idées quand elles sont confrontées au réel, et la caricature.

 

 

 

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